Gül est nigériane. Elle doit son prénom à son arrière-grand-mère, qui, elle, était turque. On n’a jamais très bien su pourquoi ni comment elle était arrivée au Nigéria, mais enfin, elle s’y était mariée et avait eu 18 enfants.
Gül vient d’arriver en Suisse, amenée ici, avec ses parents, ses deux frères, sa sœur, un oncle veuf dont les enfants ont été tués sous ses yeux, une cousine enceinte, par un passeur. Ils ont donné tout ce qu’ils avaient pour venir, dans l’espoir de trouver ici un monde meilleur.
Un monde où l’on puisse dormir la nuit sans crainte d’être réveillé.
Un monde où son père serait à l’abri de la police et de ses tortures indicibles.
Un monde où elle pourrait jouer dans la rue sans risque de se faire violer.
Un monde où elle aurait le droit d’apprendre à lire et à écrire, même en étant une fille.
Un monde plus humain que celui qu’elle a connu jusqu’à ce jour.
Il fait froid. Il fait nuit. La famille a été déposée à Vallorbe. Les enfants sont fatigués. Du haut de ses 4 ans, Gül pleurniche. Le voyage n’en finit pas. Ils errent dans ce village de montagne, où tout le monde est paisiblement endormi. Ils cherchent le centre d’enregistrement et de procédure, première étape de leur longue intégration en Suisse. Ils sont seuls au monde et ils écoutent le silence, qui paraît presque irréel. De temps en temps, on entend un train, et puis plus rien. Une heure sonne au clocher. L’oncle se demande si vraiment, ils sont dans le bon village.
Une femme apparaît. Elle est jeune, elle court. Quand elle les voit, elle s’arrête. Les enfants ont peur. Est-elle de la police? Va-t-elle leur créer des ennuis? Ou les insulter, comme ce vieux monsieur en Espagne alors que tout le monde dormait sur les bancs dans un parc? D’un pas décidé, elle vient vers eux. Elle a l’air gentille, mais il faut rester sur ses gardes. Peut-être qu’elle va les voler? A cette pensée, la mère sourit: que pourrait-elle voler, alors qu’il ne leur reste rien! Peut-être qu’elle fait partie d’un réseau qui enlève les enfants? Gül sert plus fort la main de son père. Elle a peur et sent que les siens ressentent la même chose.
La jeune femme leur parle dans une langue incompréhensible. Mais la famille sent, à son ton, qu’elle ne leur fera pas de mal. La cousine, avec son fort accent, demande: « Vallorbe? ». La jeune femme parle alors en anglais. Gül ne comprend que quelques mots, elle ne parle que l’Igbo, mais certains au village parlaient anglais; le chef, le maître d’école, son père, et d’autres encore, les hommes surtout. Le père explique qu’ils cherchent le centre. La jeune femme propose de les y conduire. Elle les guide dans les ruelles. Après quelques pas, elle demande les prénoms des enfants. Elle leur parle, leur souhaite la bienvenue. Elle propose de porter Gül, car elle sent la fillette à bout de forces. Elle la prend dans ses bras et Gül s’endort contre son épaule, bercée par le rythme de ses pas et le son de sa voix. La jeune femme s’enquiert de leur épopée.
Guidée, la famille avance rapidement. Il y a un petit chemin, et de la lumière dans une petite pièce attenante à un grand bâtiment. Un policier, ou un gardien, arrive, et explique que les procédures ne peuvent avoir lieu la nuit. Par contre, la famille peut dormir dans la petite pièce éclairée, en attendant le matin. Il apporte des couvertures.
La jeune femme dépose son précieux fardeau sur un banc. Elle l’embrasse sur le front, la borde. Elle souhaite bonne chance à la famille, puis elle disparaît dans la nuit, comme elle était venue, en courant.
Pour la famille, l’aventure suisse ne fait que commencer. Auront-ils le droit de vivre ici, de grandir en sécurité? Pour l’instant, nul ne le sait. Rentrée chez elle, la jeune femme prie. Elle sait qu’elle n’aura jamais de nouvelles de cette famille, mais de tout cœur, elle souhaite que son pays les accueille. Le lendemain, Gül se remémore ce visage qui n’a pas de nom. Dans son cœur, la jeune femme s’appellera « Nnwere », ce qui signifie Liberté.
Voili, voilà. Je fais partie de ceux qui espèrent toujours que notre pays sache ouvrir ses portes à ceux qui en ont besoin. Nous avons eu la chance de naître ici et maintenant, mais nous ne sommes ni plus méritants, ni plus honnêtes, ni plus gentils, ni plus dignes… juste plus chanceux… alors pourquoi refuser de partager cette chance avec d’autres?
Et me voilà bien triste qu’un de nos partis nationaux promette aujourd’hui de réduire de moitié l’immigration l’an prochain.
Bonjour élève Gwendoline, un fait bien d’aujourd’hui, l’exil, quand vivre sur son sol devient un cauchemar… On ne choisit pas de naître, banc, noir, jaune, sa famille, son identité… on devrait pouvoir vivre heureux là où on naît, en paix, avec un travail, un toit etc… loin d’être le cas pour tous ! Tenter sa chance ailleurs en espérant que l’herbe y soit plus verte… les pour et les contre !! Sois la bienvenue Gül à la cour de récré, MERCI à toi, bises de m’dame JB
j’aime beaucoup ton texte et sa « morale »….je partage ton souhait….de tout coeur que çà ne reste pas un « voeu pieux »….
Magnifique, émouvant et plein d’espoir. Bravo et merci, j’ai été très émue par ton texte… Bises
J’ai eu les frissons en lisant ton texte….donc tu est Suisse et y vit mais ou????? Perso je suis à Grolley 1772 Fribourg……serait coll si un jour on pouvait se rencontrer non? Bises, j’ai bien aimé le *foutoir* des mauvaises habitude et ton idée du scrpat. Bisessss
Un excellent texte qui montre bien ce que vivent les migrants et l’espoir qui est le leur en arrivant dans un autre pays que le leur . J’écoutais cette après midi une émission à la radio , sur ce qu’était devenu Sangatte , un endroit où les migrants n’ont même plus la possibilité de vivre décemment .
Bonne soirée
bisous
Un beau texte !
Très beau texte et tellement d’actualité … l’as tu vécue cette histoire ou pas ? Je ne me fais pas de souci, nous serons toujours terre d’accueil.
Bisous
Comme dans toutes mes nouvelles, un peu de vrai, un peu d’imagination, un peu de fiction…