Le texte de la quinzaine, sur le thème de la sagesse.
Pour quelques gouttes de sirop
Depuis son plus jeune âge, Eli avait été sensible à la philosophie. A 9 ans, il lisait et écrivait sans hésitations le grec et l’hébreu, il gravait de la pointe de son stylet les textes que lui dictait son maître, un psalmiste reconnu. La Vérité, la Sagesse, la Vertu, la vanité des richesses accumulées ici bas était des thèmes qui semblaient n’avoir aucun secret pour le jeune homme. Dès l’aube, il traversait le village de son pas silencieux et gracile, puis il attendait le maître dans la sérénité du petit matin.
Eli grandit. Sa route semblait tracée et jamais le moindre doute ne l’assaillait. Lorsqu’il eut 20 ans, son père demanda pour lui la main de Rachel et les tourtereaux projetaient de vivre en paix jusque dans leur vieillesse, à l’image des couples des légendes qu’on entendait le soir au coin du feu. Il écoutait avec circonspection ses aînés lui parler de leurs déboires conjugaux.
Une nuit sans lune naquit Simon et la vie sous leur tente changea du jour au lendemain. Ce petit être, sa descendance, refusait de dormir, braillant dès le crépuscule, se calmant à peine quand on lui mettait les fesses au sec. Lorsque ses dents poussèrent, les hurlements du bébé ébranlèrent les certitudes et les grandes réflexions du père.
Un soir que Rachel étaient dans la tente des femmes, avec ses consoeurs, Eli n’en put plus. Excédé, il passa sa colère, sentiment qu’il n’avait encore jamais connu, sur une grenade qui trônait au sommet d’une pile de fruits. Le jus des 613 grains gicla et l’enfant, étonné, se tut. Il observa avec acuité les gouttes rouges au bout de ses doigts puis les aspira bruyamment avec un plaisir évident. Le goût acide et sucré lui plut.
Lorsque ses pleurs recommencèrent, Eli, de nouveau maître de lui-même, pressa calmement une autre grenade et eut même l’idée d’un ajouter du miel et un peu d’eau.
Ainsi fut créé le sirop de grenadine que les pères nomades préparent encore aujourd’hui à leurs enfants lorsque leurs dents les font souffrir.
Les mots à placer étaient : fesse, attendre, richesse, dent, refuser, doute, vieillesse, circonspection, vertu, crépuscule, lune, philosophie, âge, vanité, sérénité, psalmiste, paix, graver, gracile, grenadine, image, réflexion.
Je n’ai jamais compté les grains contenus dans une grenade, mais on dit qu’il y en a 613, à l’image des 613 règles données à Moïse par l’Eternel et réunies dans le Pentateuque. D’autre part, c’est l’un des fruits les plus cités dans la Bible (avec la figue et la datte). C’était un petit commentaire destiné à votre culture biblique !
Voili, voilà.
J’aime vraiment beaucoup ton texte, quelque chose de légendaire et de très lettré, et très original.
Excellent, je ne m’attendais pas du tout à découvrir comment la grenadine avait été inventée !
Je ne sais pas si cette histoire est véridique au sujet de la naissance de ce sirop de grenadine, mais tu m’as toujours autant captivé par ton histoire….. J’adore te lire !!!! Un vrai régal !
Bises
Très belle histoire sur la difficulté de devenir parent 🙂
décidément le côté divin de la grenadine ne m’avait pas frappé jusqu’ici mais ces plumes sur la sagesse n’ont pas fini de nous étonner .
Bien jolie cette légende sur les vertus de ce jus de fruit
C’est très joli Gwendoline, même si je ne suis pas portée sur la culture biblique, j’ai aimé te lire!!!
Merci pour ce beau partage!!!
Bisous
Domi.
et ben moi je le trouve excellent ton texte, c’est vrai un peu moins prenant, mais j’adore la chute, je m’y attendais pas du tout !!!!
Bisous
Excellent, et je me demandais au fur et à mesure comment ça allait finir. Bravo, bon lundi !
Très belle histoire, j’aime beaucoup ton texte. 😀